9 février 2018

[Don Fausto Buzzi, fsspx - Il Giornale (Italie)] "La Tradition est le seul futur possible pour l'Eglise"

SOURCE - Don Fausto Buzzi, fsspx - Il Giornale (Italie) - propos recueillis par Francesco Boezi - traduction de l’original italien - 9 février 2018

La Tradition comme guide de conduite pour le futur. L'Eglise, sinon, serait destinée à ne pas avoir de futur. Entrevue avec Don Buzzi, prêtre de la Fraternité Saint Pie X 
     
La tradition est le seul futur possible pour l'Église. Don Fausto Buzzi a des idées arrêtées. Prêtre de la Fraternité Saint Pie X, fondée par Mgr Marcel François Lefebvre le 1er novembre 1970, après le Concile Vatican II, Don Buzzi est aujourd'hui assistant du supérieur italien. Il a milité pendant quelques années dans l'association Alleanza Cattolica. Puis, en 1972, il rencontre Mgr Lefebvre et entre au séminaire d'Ecône. Dans cette interview exclusive, le prêtre de la FSSPX aborde, parmi les points abordés, de la réunion doctrinale avec le Vatican.
Il Giornale : Qu’est-ce-qui sépare encore la communauté Saint-Pie-X de l’Eglise catholique ?
Don Fausto Buzzi : Il est bon de préciser que la Fraternité Saint-Pie-X n’a rien qui la sépare de l’Église catholique. Nous sommes unis à l’Église catholique et nous ne nous sommes jamais séparés d’elle malgré les divergences avec les autorités de l’Église. Nous ne sommes pas responsables de ces divergences. Mgr Lefebvre disait tout le temps qu’il était condamné pour ce qu’avant les papes louaient en lui, particulièrement Pie XII. C’est Rome qui a changé et avec le concile Vatican II elle s’est écartée de la Tradition pluriséculaire de l’Église. Pour être synthétique on peut dire que ce qui nous divise avec Rome sont des problèmes doctrinaux graves et de fond.
Il Giornale : Un curé catholique m’a dit une fois : « Beaucoup parlent de schisme, mais ceux-ci n’ont pas la compétence théologique d’un Marcel Lefebvre. » Est-ce vrai?
Don Fausto Buzzi : Beaucoup critiquent ou condamnent la Fraternité Saint-Pie-X sans la connaître et sans comprendre les graves motifs qui la mettent dans une situation d’hostilité avec les autorités ecclésiastiques. Aujourd’hui beaucoup de personnes, prêtres ou laïcs, commencent à se demander qu’est ce qui est en train d’arriver dans l’Église et ouvrent les yeux sur le fait que ceux qui ont été classés pendant de nombreuses années comme schismatiques sont peut-être ceux qui sont restés les plus fidèles à l’Église catholique et, paradoxalement, les plus fidèles à la papauté. Mgr Lefebvre a voulu que l’on étudie la Somme Théologique de Saint Thomas d’Aquin et les autres textes classiques de la théologie dans nos séminaires. Je vous assure que pour nous cela a été une grande grâce de recevoir une aussi profonde et solide formation.
Il Giornale : Quelle est votre opinion sur le pape François ?
Don Fausto Buzzi : Pour nous le pape François n’est pas pire ni meilleur que les autres papes du Concile et du post-Concile. Il travaille dans le même chantier inauguré par Jean XXIII, celui de l’auto-démolition de l’Église catholique pour en construire une autre, conforme à l’esprit libéral du monde. En fait, je dirai même plus : l’actuel pape n’est pas aussi responsable comme le fut Paul VI. Ce pape a fait le Concile, l’a conclu, et il a fait toutes les réformes. Et tout ceci est maintenant la cause de la très grave crise que nous voyons dans l’Église. Les gestes et les paroles du pape François semblent certes plus graves que ceux de ses prédécesseurs. Mais ce n’est pas comme ça. C’est l’effet médiatique qui fait beaucoup plus caisse de résonance qu’autrefois. En substance cependant les actes de Paul VI sont bien plus graves que ceux de François.
Il Giornale : Cependant Bergoglio semble avoir fait des pas en avant avec vous ?
Don Fausto Buzzi : Il n’a certainement pas fait de pas doctrinaux envers nous. Cependant il nous considère une réalité de la « périphérie ». Comme tels nous sommes l’objet de sa bienveillance. Quand il était cardinal à Buenos-Aires un de nos prêtres lui offrit comme lecture la vie de notre fondateur. Il la lut et il en resta sérieusement impressionné. Peut-être cela aussi a permis qu’il ait un œil bienveillant à notre égard. Beaucoup se demandent pourquoi il n’a pas été aussi bienveillant avec les Franciscains de l’Immaculé qui étaient décidément en train d’embrasser la tradition catholique. Bien au contraire, dans ce cas, au mépris de la miséricorde, il les a traités durement et avec une extrême sévérité.
Il Giornale : Beaucoup vous considèrent comme des "extrémistes" de la foi ...
Don Fausto Buzzi : Voyez-vous, la foi est une vertu théologique, et une vertu théologique peut atteindre l'infini parce que l'objet est Dieu lui-même et donc il n'y a pas de limite dans la foi, et en ce sens il serait vertueux d'être extrémiste. Les paroles de notre Seigneur quand il dit, par exemple, "Celui qui n'est pas avec moi est contre moi" ou les paroles de saint Pierre "il n'y a pas d'autre nom [que Jésus Christ] sous le ciel qui peut nous sauver." Dites-moi si ces paroles ne sont pas "extrémistes". Si l'on considère les martyrs qui sont morts plutôt que de trahir leur foi, comme les juger? Comme des extrémistes? Il me semble que nous perdons le sens de la foi.
Il Giornale : Que pensez-vous du débat doctrinal autour d'"Amoris Laetitia"?
Don Fausto Buzzi : Voyez-vous, cette question me pousse à me répéter. Si toutes les initiatives visant à corriger ce document et à défendre la famille chrétienne indissoluble et sacralisée par un sacrement sont louables, le véritable problème se situe toutefois en amont. Savez-vous où sont les racines d'Amoris Laetitia? Nous les trouvons dans un document du Concile, Gaudium et Spes. Donc, comme je vous le disais, l'effroyable crise de l'Église est due à son ADN, c'est-à-dire à Vatican II. Pensez-vous que si au lieu de Gaudium et Spes avait été publié à sa place l'encyclique de Pie XI Casti Connubi, aurions-nous la catastrophique Amoris Laetitia aujourd'hui? Je ne le pense pas.
Il Giornale : Et sur la réhabilitation de Luther?
Don Fausto Buzzi : Que puis-je dire? Réhabiliter le plus grand hérétique de l'histoire, qui a sécularisé toute la religion chrétienne, qui a fait perdre l'Eglise des peuples entiers, est un suicide doctrinal et une falsification histoire. La réhabilitation de Luther fait partie des utopies œcuméniques des 50 dernières années, une utopie qui conduit les catholiques à l'apostasie mon plus silencieuse, mais assourdissante. Je recommande la lecture d'un nouveau livre sur Luther est sorti récemment: «Le vrai visage Luther» aux éditions PIANE, écrit par un de nos prêtres, professeur d'ecclésiologie au séminaire d'Ecône, en lisant ce livre on comprend l'absurdité de cette prétendue réhabilitation.
Il Giornale : Voyez-vous la réunification doctrinale entre vous et le Vatican possible dans le futur?
Don Fausto Buzzi : Je ne suis pas un prophète, nous espérons que cela arrivera surtout pour le salut de tant d'âmes qui risquent de se perdre pour l'éternité, mais si vous le permettez, je voudrais vous dire ce que nous pouvons faire aujourd'hui pour contribuer au triomphe de la tradition dans l'Eglise. Nous devons tous, tous les catholiques, les évêques, les prêtres fidèles, revenir à la tradition catholique habituelle, et personne ne devrait craindre de se sentir contre les autorités de l'Église. Parce qu'en fait ce n'est pas contre elles, mais au contraire c'est le moyen le plus efficace de les aider à comprendre que nous devons retourner à la Tradition qui est le seul et unique avenir de la Sainte Eglise.